3. Le mot dit à la pensée.

Le Mot dit à la Pensée :

-« Je suis plus important que vous car tout ce qui ne se prononce pas n’a point d’importance. »

La Pensée pensa tout haut:

-« Je ne me prononce peut-être pas mais le mot n’atteindra jamais ma pureté. Tout ce qui est pensé n’est pas, forcément, prononcé à haute voix ! »

Le Mot, quelque peu déconcerté, prononça :

-« Oui mais, MOI, je sers à écrire les lettres d’amours ou, pour les plus grandes douleurs, celle d’adieu. Est-ce vous, ma chère, qui dictezces mots ?

La Pensée expliqua avec appoint :

-« Peut-être pas MAIS je suis l’artère de l’homme, et, MOI, je suis utile à la vie, sans pensée pas d’être, pas de vie ni de mort aux yeux des hommes, finie la compréhension des choses, finies les idées qui, je vous le rappelle, viennent de la tête et non de la langue ou de la main.

Le Mot balbutia :

« Si vous êtes l’artère de l’homme alors j’en suis le cœur ! Vous vous dites utile à la vie et à la compréhension mais je suis les mots « vie » et « compréhension ». La compréhension mutuelle des choses vient des mots et non d’une pensée, unique, qu’un homme cupide et avare ne partage pas ! »

La Pensée, énervée, répondit :

« Vous vous croyez tout blanc ? Mais d’où viennent les insultes et les mots violents ? C’est vous, Mot, qui avait créé l’arrogance et la vanité !  Vous avez détruit la clarté des penséesen psalmodiant vos incohérentes paroles ! Folie de la nature que de vous créer, infâme qui détruisez les langues du monde entier ! »

Le Mot, à son tour énervé, s’écria :

« Et la haine ? Vous me donnez des leçons ? N’est pas l’un des sentiments que la pensée a créé et qui, lentement, prend de la place dans le cœur et la tête des gens ? N’est ce point vous qui en emplissez le corps des gens jusqu’à les faire exploser ? »

 Pour ne pas perdre face, la Pensée articula :

« Si vous voulez m’insulter, en faisant peser sur moi, le résultat de VOS erreurs, allez-y ! Ne vous gênez pas ! Mais, au fait, n’est ce pas bizarre que l’expression « malheurs du monde » se dit aussi : « Maux du monde » ?

Le mot cria :

« Sans mots, pas de paroles, pas d’écrits ! »

La pensée hurla :

« Inutile d’écrire ou de dire, lorsque l’on pense !! »

Le mot s’exclama :

« Je suis plus important que vous car tout ce qui ne se prononce pas n’a pas d’importance. »